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Bonne pratique : Le management reconfiguré

Sous les effets de la crise sanitaire, cette entreprise normande de technologie financière (« fintech ») qui ne pratiquait pas le télétravail, a fait le choix d’un mode d’organisation combinant du travail en présentiel et du travail à distance. Management par la confiance, par le résultat, reconfiguration des espaces, charte de télétravail... sont autant de chantiers qui se sont ouverts au fil des derniers mois pour encadrer ces nouvelles pratiques de travail qui ont conduit à une transformation profonde des pratiques managériales et à de véritables « apprentissages organisationnels ».

Basée à Hérouville-Saint-Clair (Calvados), Dejamobile est une entreprise d’une quarantaine de salariés proposant des services mobiles sécurisés utilisant les technologies sans contact et de proximité dans les domaines du paiement, du commerce et des transports. Début 2020, l’entreprise souhaite débuter une réflexion sur le télétravail pour mieux s’aligner avec les pratiques réelles et les souhaits de ses collaborateurs, essentiellement des développeurs. Cette opération a été menée avec succès dans le cadre du dispositif « Objectif Télétravail ». La pandémie de 2020 a accéléré un processus déjà en germe et a permis la mise en place d’un mode d’organisation mixte, aujourd’hui expérimenté, qui reconfigure les pratiques managériales.

Qu’ont-ils fait ?

Au sortir du printemps 2020, l’entreprise effectue un sondage interne qui conclut que 88% des collaborateurs ont fait preuve de davantage d’autonomie en situation de télétravail. Il révèle également que le télétravailleur a permis de monter en compétences sur la recherche de solutions à des problématiques techniques en ayant recours à de l’auto-formation. Certains manageurs mettent en place des points équipe quotidiens en début de journée qui n’existaient pas auparavant. Et l’équipe dirigeante formalise ce qui était avant du registre de l’informel : des espaces de discussions ouvertes, des réunions de communication d’entreprise tous les15 jours afin que tout le monde bénéficie du même niveau d’information... Pendant son séminaire d’entreprise, l’entreprise consacre également des ateliers pour repenser le collectif en mode télétravail. Avec une équipe managériale relativement jeune en termes d’expérience et ayant débuté en pleine crise (12 collaborateurs avaient moins d’un an d’ancienneté en mars 2020), Dejamobile accompagne ses référents techniques (appelés «lead tech» dans les métiers du développement informatique) avec des formations management et des outils ludiques. Dejamobile veille également à la détection des signaux faibles en s’appuyant sur la mise en place d’espaces d’échange et d’écoute pour compenser l’absence d’instants informels en présentiel. En effet, les primo-arrivants en phase d’intégration ont des difficultés à saisir les codes et à s’imprégner de la culture d’entreprise. Pour les encadrants, c’est notamment l’occasion de veiller à ces problématiques que les collaborateurs font remonter.

Bonnes pratiques - Dejamobile

Formaliser les règles de télétravail et de travail sur site

Avant la mise en place de la charte, les salariés de Dejamobile ne pratiquaient pas ou peu de télétravail. Les collaborateurs pouvaient en bénéficier de façon partielle pour convenance personnelle. A l’issue de la période de télétravail « subi » du printemps 2020, l’entreprise lance un premier retour d’expérience (REX) sur le vécu de cette période sur le mode de la co-construction avec les salariés. Elle initie des sondages anonymes et des « groupes de parole » qui permettent la remontée : de certaines situations difficiles (sentiment d’isolement de certains collaborateurs, diminution voire disparition des échanges informels, baisse de motivation) ; parfois des critiques tant de la part des collaborateurs que des responsables techniques ; mais aussi des opportunités d’amélioration des modes de collaboration. Elle élabore une charte ouvrant la possibilité de télétravail en affichant une finalité de présence au bureau, qui constitue le fil rouge de cette charte. La présence s’organise autour de trois approches : la « présence projet » le lundi ; la « journée entreprise » le jeudi ; et une approche « managériale » laissant une latitude aux responsables d’organiser des temps de présence avec leurs équipes environ deux journées par mois.

Avec quels leviers ?

Pour les manageurs, « cette expérimentation aura mis en lumière l’importance primordiale de la confiance », témoigne Camille Lixon, responsable des Ressources Humaines et de l’Expérience Collaborateurs chez Dejamobile. « D’un point de vue managérial, on a davantage fait confiance et laissé les choses s’organiser, avec plus d’autonomie. Et pour certains responsables, cela a parfois bousculé leurs repères ! », ajoute-t-elle. L’attention est moins portée au processus qu’au résultat final du produit ou du service. En matière de développement des compétences, une difficulté pour les manageurs résidait dans un contact direct avec les équipes moins fréquent ce qui nécessitait une plus grande vigilance. Pour cela, Dejamobile encourage les collaborateurs à être « acteurs de leur carrière » : en ayant une réflexion sur le projet professionnel, en détectant leurs propres besoins en formation, en lien avec les manageurs et leur rôle d’évaluation des compétences.

Pour quels effets ?

Un enseignement de la crise : les locaux demeurent des espaces de régulation pour les manageurs et les équipes. « Le bureau ne doit pas être attrayant seulement pour les conditions matérielles auxquelles il permet d’accéder : c’est aussi le lieu-repère de la culture d’entreprise », concède Camille Lixon, en insistant sur la qualité de la présence. D’après une première enquête interne, 74% des collaborateurs déclaraient être prêts à passer en mode bureaux partagés (flex office). Pas question pour autant d’avoir recours au télétravail à 100% (full remote), ni de déménager dans un tiers-lieu : Dejamobile tient à ses valeurs de solidarité et souhaite pouvoir proposer à tous les collaborateurs d’être présents au même moment sur site. Toujours dans une logique de co-construction, l’entreprise envisage d’interroger à nouveau les collaborateurs sur le bureau de demain. Pour les manageurs, cela part également du besoin de bénéficier d’espaces dédiés favorisant des échanges plus qualitatifs pour des temps de régulation. Pour 2022, l’enjeu managérial portera également sur l’équilibre des temps personnels et professionnels, l’égalité des conditions de travail et l’attention aux risques associés (surcharge de travail, risques psychosociaux, isolement, droit à la déconnexion).

Pour aller plus loin :

Cas extrait du Récits d’action & enseignements - Travail à distance et en présentiel : de nouveaux équilibres à construire pour le management, édité en janvier 2022 par l'Anact, en collaboration avec l'APEC.

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Couverture Recits d’action & enseignements - Travail à distance et en présentiel : de nouveaux equilibres a construire pour le management
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